Aujourd’hui, dimanche 19 mars, nous commémorons le 55ème anniversaire du cessez le feu en Algérie. C’est toujours pour moi un moment fort d’être présent auprès des anciens combattants. C’est une date importante pour notre pays et à laquelle je suis particulièrement attaché notamment parce qu’elle fait partie intégrante de mon histoire familiale.
Le 6 décembre 2012, la République française décidait d’instituer une journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc le 19 mars. Cette date a été choisie par le Parlement et inscrite dans la loi pour clarifier la position officielle de la France et assurer une transmission apaisée de la mémoire de notre patrie aux générations futures.
Alors que certains contestent encore ce jour de commémoration, j’y suis favorable pour deux raisons principales :
Elle est significative d’un point de vue historique
Le 19 mars est une date très importante de notre histoire, de l’histoire de l’Algérie, et de l’histoire commune de nos deux Nations. C’est en effet le 19 mars 1962 qu’intervenait le cessez-le-feu entre la France et le FLN algérien, au lendemain de la signature des Accords d’Evian. Une autre date, le 5 décembre, avait été choisie par le Président Chirac mais elle ne renvoyait à aucun évènement historique.
Evidemment, commémorer le 19 mars ne saurait aucunement signifier que la République française a oublié les pieds-noirs et les harkis, ainsi que leurs familles, leurs souffrances, les drames, les morts d’après le 19 mars. Vouloir faire croire que commérer cette date historique, comme le Front National qui s’est ostensiblement opposé au 19 mars aujourd’hui, est irrespectueux du drame pieds noirs et harkis est une cynique manipulation politicienne. Personne n’oserait contester la date du 8 mai 1945 au prétexte fallacieux qu’il y a eu des centaines de milliers de morts japonais après cette date, le 6 août 1945 à Hiroshima et le 9 août 1945 à Nagasaki.
Contester le 19 mars 55 ans après les faits, c’est aussi contester l’action d’un homme, le Général de Gaulle qui décida de mettre fin à une guerre qui avait trop duré avec de nombreux morts tant du côté du peuple algérien qui souhaitait son indépendance que des pieds-noirs et des harkis qui étaient chez eux là-bas, à Oran ou à Alger.
En tant qu’élu, je suis fier que la République française ait choisi le 19 mars. Et en tant que citoyen français, je considère qu’elle célèbre aussi la mémoire de ma famille, en particulier de ma mère qui est née et a vécu 7 ans en Algérie.
Nous pouvons partager le 19 mars avec les Algériens
La colonisation, les guerres qui en suivirent, la guerre d’Algérie appartiennent à notre histoire et à l’histoire des pays concernés, de l’autre côté du pourtour méditerranéen, en Afrique, en Asie. S’en souvenir, avoir la mémoire de notre passé est essentiel pour comprendre l’identité de notre pays. Mais la mémoire peut rassembler comme elle peut diviser. Je préfère la mémoire qui permet à tous, quelle que soit l’histoire personnelle de nos aïeux, de bien vivre ensemble. Et le 19 mars peut être commémoré tant par les Français que par les Algériens.
L’histoire entre nos deux peuples est complexe, parsemée de liens indéfectibles et de plaies sanglantes, de joies et de peines, d’amour et de souffrance. Que deux pays puissent commérer ensemble la fin d’une guerre qu’ils ont menée est un moyen de partager ensemble la même histoire. Car il n’y a pas une histoire française d’un côté et une histoire algérienne de l’autre. Il n’y a qu’une histoire vécue par tous.
55 ans après le cessez-le-feu, la mémoire n’est ni excuse, ni une repentance. C’est un souvenir commun qui permet de ne pas revivre dans l’avenir les drames du passé. L’histoire peut se regarder avec calme et sérénité. Et la mémoire nous permet, à nous, citoyens français, d’aimer notre patrie, d’être fiers de ce que nous sommes. Il n’y a aucune honte à nous souvenir de la guerre d’Algérie, à évaluer les actions passées avec lucidité. Il ne s’agit pas de désigner des perdants et des vainqueurs. Les guerres sont toujours des défaites pour ceux qui les vivent, pour ceux qui meurent comme pour ceux qui survivent.
Aimer son pays ne voudra jamais dire détester celui des autres. Les vrais patriotes aiment leur pays. Les nationalistes détestent celui des autres.
Commémorer le 19 mars, c’est aimer son pays tel qu’il a été, dans les heures les plus glorieuses comme dans les temps difficiles. Commémorer le 19 mars, c’est aimer son pays tel qu’il est, un pays où il n’y a que des citoyens d’où qu’ils viennent, d’où que leurs aïeux soient, des Français ni plus ni moins.
Vive le 19 mars, vive la République et vive la France.